jeudi 15 août 2013

29 sa

Des semaines sans rien écrire. Il s'en passe des choses pourtant, mais je me demande toujours un peu si elles ont leur place sur le blog maintenant que le thème est différent. Je ne me vois pas tellement tenir un blog de maman, je préfère à tort ou à raison sélectionner les infos qui ont un lien avec le don ou au moins avec la fiv. 

En tous les cas oui, il s'en passe des choses et quand même, après des semaines de vacances je vais faire un petit point, histoire de vous tenir au courant et de réfléchir aussi à cette nouvelle situation. 


Le bébé 

Alors... je commence par le plus important: le bébé va bien. Nous ne voulons pas connaître le sexe et pour l'instant aucun médecin n'a encore gaffé. On croise les doigts pour que ça continue. A la question fréquente: "tu préfères un garçon ou une fille"... franchement après être passée par la case stérilité... c'est avec une totale sincérité que je peux répondre que cela m'est égal. La question elle-même me paraît plutôt grossière. Note pour plus tard: lister les interrogations débiles des gens sur: la stérilité, la ménopause précoce, la PMA, la maternité... généralement ce sont les mêmes personnes qui les posent et elles vous suivent tout au long du parcours de leurs interrogations naïves (quand elles ne sont pas blessantes). Donc à part la question du genre, restent les questions essentielles: il a d'après les échographies tout ce qu'il faut où il faut et il bouge très souvent (depuis la 18ème semaine) ce qui me rassure et me sauve de la plupart de mes angoisses. S'il pouvait d'ailleurs bouger encore un petit peu ce serait bien parce que là il est en siège. C'est pas un gros souci, c'est juste que je préfèrerais éviter la césarienne, mais bon, c'est comme avec le genre, l'important c'est qu'il/elle naisse, en bonne santé, je ne vais pas faire une fixation sur le genre d'accouchement que je souhaiterais, je suis déjà bien consciente d'avoir la chance immense d'envisager concrètement un accouchement dans les mois à venir. 


La grossesse 

J'avais un petit peu fait le deuil de la grossesse quand même, j'en rêvais mais je l'avais un petit peu désinvestie quand même je pense, avant que ça ne marche, pour me protéger, pour aller de l'avant. Ce que je voulais, c'était avant tout élever un enfant, fonder une famille... la grossesse n'était pas le point névralgique. Finalement je suis presque surprise d'aimer autant être enceinte et que cela se passe aussi bien: je n'ai pas vomi, j'ai bien dormi pendant 6 mois (oui, bon, c'est bel et bien fini là, et pour quelques années), pas de diabète à l'horizon, j'ai modérément grossi, j'ai pas d'envies obsessionnelles, je me trouve canon, j'ai une libido d'enfer... J'arrive quand même à parler d'autre chose que du bébé mais franchement: je ne pense qu'à ce petit être lové là au-dedans de moi et qui me rend vivante. 


La FIVDO 

Pour mon mari, mes proches, mes parents, la FIV est derrière. Ils ressentent sincèrement, je pense, cette grossesse comme tout à fait normale. Pour moi, je dois dire que les choses demeurent un tout petit peu plus compliquées quand même. Mon bonheur est immense, que l'on s'entende bien, et je ne reviendrais en aucun cas en arrière, mais je trouve pertinent ici d'être sincère sur les interrogations et les séquelles (le mot est peut-être un peu fort) qui subsistent. 

Concernant la FIV, je reste il me semble quand même un peu amère: quand j'apprends que telle ou telle amie/collègue/cousine est tombée enceinte en one shot ou à peine plus, je rapport à nous et à toutes celles qui galèrent et je n'arrive pas à faire sans une pensée amère/cynique/méchante. Je trouve toujours ça dégueulasse que certaines puissent faire des bébés au lit et que d'autres doivent aller à l'étranger, vider leur compte en banque, essuyer les réflexions débiles des gens/médecins, se creuser la tête sur des questions étiques, s'enfiler des gélules dans le vagin et des aiguilles dans le ventre et ailleurs. C'est une amertume dont j'aimerais bien, un jour, me débarrasser mais sincèrement je crois que c'est pas pour tout de suite. Peut-être à la naissance? 

Concernant la FIVDO, je sais bien que ç'a été la chance de ma vie. Mais évidemment j'aurais voulu faire à moins. Pas tant personnellement parce que finalement, ça ne change rien pour moi, j'aime cet enfant et je vais le prendre comme mien, j'en suis sûre, mais je reste préoccupée de ce que lui/elle, pensera de notre choix et de son identité tronquée. J'ai une inquiétude tout de même concernant ses questions à l'adolescence par exemple... j'aurais voulu une filiation habituelle pour ne pas vivre avec ces doutes. Je crains un petit peu le traditionnel jeu des ressemblances auquel vont se livrer tous ceux qui viendront voir notre bébé à la maternité... je ne sais pas ce que me feront les phrases: "c'est tout son père" ou même "oh, il a tes yeux"... alors que mon mari lui s'en fiche royalement et attend même cette étape avec impatience puisque selon lui elle me montrera que cette question de la ressemblance est totalement non pertinente. Il est convaincu que certains trouveront que le bébé me ressemble, et il n'a certainement pas tort. 

Je sens parfois un décalage entre le vécu de mon mari et le mien: si nous avons vécu la PMA ensemble, nous vivons maintenant les choses très différemment. Pour lui il n'en est plus jamais question (sauf quand il évoque nos futurs enfants, et donc nos futurs voyages en Espagne) alors que pour moi la question reste essentielle. Il me reste une blessure, des craintes dues à mon caryotype, à la ménopause précoce... 

A côté de ces interrogations, il y a tout ce que la FIVDO a de beau et qui me porte: ce résultat hyper rapide, cette grossesse qui se passe magnifiquement bien, la gratitude immense que j'éprouve pour l'équipe médicale en Espagne et pour la donneuse, cette femme qui vit quelque part, qui respire en même temps que moi, qui pense parfois à son don, qui a changé le cours de ma vie et que je ne rencontrerai jamais... j'imagine une espèce de connexion entre nous qui nous dépasse et que nous n'établirons jamais réellement mais qui est tellement essentielle à mon bonheur actuel... Parfois je pense à elle et à cette chance immense que j'ai eu que cette personne existe, ça me bouleverse. Ca m'émeut de penser à tous les gens qui ont rendu cet enfant possible. Je me dis aussi qu'il y a quelques années, je n'aurais jamais pu connaître ce que je vis maintenant et je me sens incroyablement chanceuse. Je pense au blog, à ce qu'il m'a apporté... à ces échanges qui nous permettent d'accéder à un peu de compréhension et à une solidarité que je ne soupçonnais pas. 

Bilan FIVDO à la 29e semaine: oui, je me pose des questions, j'ai été changée par la l'annonce de ma ménopause et par la PMA, je suis parfois une vraie salope qui ne peut pas se réjouir immédiatement de toutes les annonces de grossesse ("non, en C1 c'est juste pas correct")... Mais je suis aussi et surtout enceinte, contente, épanouie, en vie... J'espère que toutes celles qui hésitent pourront faire un choix qui leur conviendra, et j'espère que toutes celles qui ont pris leur décision s'approchent un jour après l'autre de leur rêve. C'est promis, je reviens avant la naissance: au prochain épisode vous devriez au moins savoir si bébé s'est retourné.